Un lien entre le peuple Shiwiar, vivant en Haute-Amazonie,
et le Palais de Tokyo, site de création contemporaine, à Paris.
Un projet de Valéry Grancher 2005
26 octobre 2005
La scolarité shiwiar
Ecole shiwiar
Au tout début de ce blog, j'avais posté une perle qui était la traduction écrite en langue shiwiar du texte des droits de l'homme. J'avais ironisé à ce sujet en écrivant "quelle ironie de publier un tel texte quand on sait que les shiwiars sont de tradition orale..."
Lors de mon expédition, j'ai fait une découverte:
A savoir que l'origine de cette traduction est la confédération shiwiar fondée par Pascual et Juan Kunchicuy.
Quelques explications:
Lors de mes conversations avec Pascual et Juan, le premier jour de mon séjour en Equateur à Quito, j'avais abordé le thème de leur acculturation et éducation américaine chez les salésiens: Deux années pour être "graduated", puis les deux frères à leur retour des USA, étaient rentrés à l'Université de Quito où ils ont obtenu leur diplôme d'état de guide touristique sur la biodiversité amzonienne. Et C'est en tant que guide, qu'ils ont commencé à vivre, d'où le fait que Pascual vive à Puyo ville hébergeant également, bon nombre d'hôtels, d'agences de voyages proposant des trecks en amazonie...
Au regard de cette industrie et des dégâts constatés sur certaines communautés comme les quichuas, qui désormais ne vivent plus sous des toits de palmes tressées mais sous des tôles, et qui ont de plus totalement perdus leurs connaissances de leurs milieux pour quitter la "rain forest" pour devenir des manutentionaires alcooliques de Puyo; les deux frères ont décidé de faire quelque chose qui puisse épargner leurs communautés shiwiars.
La première chose à faire étant de récupérer de la part de l'état équatorien les terres ancestrales, et pour cela, il fallait faire reconnaître comme ethnie indépendant les shiwiars d'où la nécessité de valoriser leurs traditions culturelles via une confédération qui puisse faire partie de la CODENPE (organisme de consultation de la cause indigène dépendant de la présidence de la république équatorienne) chose faite aujourd'hui; la deuxième chose à faire étant de rendre pérenne les traditions culturelles de leurs communautés par une politique d'éducation apropriée...
Il faut savoir que le père de Juan et Pascual est un très puissant chamane shiwiar frère du chef de Tanguntsa Gonzalo, et que ce chamane avait compris que sa communauté ne pouvait éternellement fuir les évangélistes en s'enfonçant toujours plus profondément dans la jungle, il avait également compris que plutôt que subir l'influence de ces colons mystiques qui n'avait pour objectif que d'effacer leurs traditions, il fallait devenir actif, comprendre de l'intérieur les pédagogies salésiennes de l'intérieur pour en faire un usage proprement shiwiar, et la meilleure façon de comprendre cela, était de faire subir à deux de ses fils un tel enseignement, et c'est ainsi que Pascual et Juan furent confiés aux Salésiens et passèrent deux années aux USA...
A leur retour, en toute logique, plutôt que suivre les salésiens et devenir leurs évangélistes, ils n'ont non seulement nullement renoncé à leurs pratiques spirituelles shiwiars mais ont répondu scrupuleusement aux désirs de leur père.
Et ils avaient compris que la force de conviction des salésiens venaient de deux faits:
- Une tradition culturelle forte
- Une écriture avec des textes sacrés.
Et ils ont décidé il y a trois années de créer pour la première fois de toute l'histoire de leur ethnie, une écriture shiwiar dérivée de l'écriture latine (espagnole), dont le texte des droits de l'homme est un premier exemple...
En plus de cette écriture, une politique de mise à l'écrit de tous leurs savoirs a été amorcés, la transcription en espagnol et langue shiwiar écrite des chants, avec enregistrements sonores des dits chants sur CD, la réalisation d'un DVD sur leur vie quotidienne ect... ect...
Et en Parallèle de tout cela, il y a une année la première école shiwiar a été crée à Tanguntsa prodiguant l'enseignement de l'écriture et la lecture des langues espagnoles et shiwiars.
Ainsi les techniques pédagogiques prodiguées par le salésiens sur Juan et Pascual sont reproduit dans l'école de Tanguntsa par les shiwiars eux mêmes à leur propre usage.
Ces politiques ont ainsi aidé à définir un territoire culturel lié aux communautés shiwiars, facilitant leur reconnaissance comme ethnie indépendante par l'état équatorien et expliquant également la facilité avec laquelle mon projet a pu être réalisé avec eux, car il y avait une convergence d'intérêts:
Mon projet est quelque peu instrumentalisé de leur part, car lors de mon retour, Pascual n'a pas manqué d'en parler en ces termes à la CODENPE (Présidence de la république):
- A savoir qu'un grands musée français s'intéressait à leur culture, le projet apportant ainsi à leurs politiques culturels shiwiars une caution internationale, facilitant ainsi désormais les demandes faites par cette communauté à l'état équatorien, que ce soit des subventions pour leurs écoles, ou la rétrocession de territoires:
Ainsi ils projettent de construire leur propre piste d'avion, pour ne plus dépendre des quichuas de Chona...
Ainsi à l'issue de ces discussions abordant ces thèmes, je me suis aperçu qu'il y avait un manque de moyens matériels flagrant pour prodiguer cet enseignement:
Lors de la préparation de ce projet qui ne peut exister sans les shiwiars, un budget fut dédié à leur cause pour l'achat de matériels qui leurs seraient nécessaires, et ainsi une partie du budget fut dédiée à l'équipement de cette petite école (la photo), pour qu'elle puisse avoir un tableau, des craies, un tampon effaceur, et un cartable complet pour chaque écolier; ainsi que l'électrification par panneaux solaires de la petite école...
Ce fut chose faite avec grand plaisir, j'ai d'ailleurs publié sur ce blog les photos de Pascual (à sa demande) de la remise de ce materiel scolaire, à chaque enfant et professeur qui fut faite de façon assez solennelle (ils ont organisé cette petite cérémonie) ce qui eut le mérite de me plonger dans une profonde gêne, mais l'émotion fut à la hauteur de leur geste...
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire