20 septembre 2006

Les dégats de la France en Equateur: Perenco



Ce jour j'ai reçu un email d'Hélène Bannier, qui m'avait interviewé sur radio pulsar et qui a réalisé ce documentaire cet été en Orellana en Equateur, toujours en amazonie....
Il s'agit cette fois des peuples quichuas...

"Cela faisait longtemps que je ne n'étais pas venue visiter votre blog.
Je me disais que ça vous intéresserait peut-être de prendre connaissance de ce doc réalisé cet été dans l'Orellana, dans les concessions d'une compagnie francaise, Perenco

http://helene.bannier.free.fr/l-or-sale-documentaire-sonore.mp3

à bientôt, en espérant que ce lien fonctionne!"


Bref je vous invite à l'écouter sur ce lien: Cela est édifiant et vraiment, pensez y quand vous allumez le moteur de votre voiture:
Cela fait vingt ans que je refuse de passer le permis B pour cette raison exactement...

Le responsable de cette horreur: Perenco, société française bien de chez nous !!!

10 septembre 2006

Un panorama




Je ne pouvais m'empêcher de le publier une fois terminé:
Voilà un panorama réalisé par interpolation numérique ;-)
Il représente le Pastaza avant d'arriver à Puyo, ce fleuve qui nourrit toute la région des shiwiars au travers de ses divers rios, et ramifications...
Vous remarquerez à quel point le niveau de l'eau est bas: On ne devrait pas voir un seul gravier, et on est en plein début des saisons des pluies. Cette sécheresse à deux causes:
- Le barrage en amont qui diminue le débit
- Le réchauffement climatique qui agit sur les précipitations en amont sur la cordillère des Andes, et cela de façon directe.
Le résultat est que la jungle en aval en subit également les conséquences: baisse du niveau des rios, diminution du taux d'humidité au plus profond de la jungle et tout cela agit de façon négative sur la biodiversité...
Les images cachent bien des choses...

05 septembre 2006

Le Chat



Cet été, linternaute.com a organisé un chat en leur locaux, j'ai le plaisir de publier ici la transcription de cette itw faite par les internautes au sujet de ce projet :

"L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète".

Depuis les coins les plus reculés d'Amazonie, d'un petit village nommé Tanguntsa, Valéry Grancher nous a ramené images, vidéo et une histoire émouvante. Il est venu nous parler de ce "Shiwiars Project".

La retranscription du chat

Vous travaillez souvent avec le Palais de Tokyo ?
Valery Grancher :
Assez souvent, depuis deux années.
Comment êtes-vous rentré en contact avec les indiens ? Aviez-vous un interprète ?
Valery Grancher : Le contact s'est établi via leur confédération politique dont le chef fut mon interlocuteur, guide et interprète : Pascual Kunchicuy Carrasco.

"L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète"
Combien de temps êtes-vous resté en Amazonie ?
Valery Grancher :
Dans la communauté, je suis resté 6 jours, et en Amazonie 12 jours.

De quelle manière avez-vous été accueilli par les Shiwiars ?
Valery Grancher :
De façon extrêmement cordiale, et solennelle à la fois, j'ai eu droit à une cérémonie à mon arrivée et avant mon départ pour mon retour en France.

Comment est né ce projet ?
Valery Grancher :
Ce projet est né suite à une conférence faite au Palais de Tokyo sur le Wi-Fi durant laquelle je citais des exemples d'utilisations de ce type de réseaux par des populations indigènes dans le monde. Et le meilleur exemple est l'exemple amazonien. Le Palais de Tokyo me proposait alors de penser un projet...

Pourquoi avoir choisi l'Amazonie ?
Valery Grancher :
L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète, et représente à la fois une histoire de cinq siècles de résistance culturelle face aux diverses colonisations. Il représente la plus longue histoire en ce qui concerne le rapport entre les technologies de l'information et ces populations : les Shuars (jivaros comme les shiwiars) ont dès les années 60 réalisé des réseaux radio pour arriver aujourd'hui aux réseaux Internet...

Quel était l'objectif de ce voyage ?
Valery Grancher :
Etablir un lien entre deux mondes qui ne sont pas censés se rencontrer : le monde de l'art contemporain et cette communauté.

Je voudrais savoir ce qui vous a posé le plus de problèmes d'adaptation ?
Valery Grancher :
Ce sont surtout des problèmes physiques : fatigue, résistance aux conditions locales, sanitaires et climatologiques.

Aviez-vous déjà vécu dans une tribu avant cette expérience en Amazonie ?
Valery Grancher :
Jamais.

Que vous a apporté cette expérience en Amazonie ?
Valéry Grancher:
Elle m'a apportée une expérience existentielle, et elle leur a apporté une plus grande visibilité.

"Etablir un lien entre deux mondes qui ne sont pas censés se rencontrer"
Comment expliquez vous l'avancée technologique en Equateur ? Est-ce dû à l'action d'un FAI qui y a vu un marché porteur ?
Valery Grancher :
Le contexte est très différent, les confédérations politiques indigènes (pour ce qui est des jivaros comme les shiwiars) ont dès les années 60 bénéficié des technologies au contact des prospecteurs pétroliers et évangélistes et ont su les détourner à des fins politiques pour leurs propres usages. Ils ont inspiré les sandinistes du Nicaragua et les Zapatistes du Chiapas. Mais les Yamonamis ont pris en main leur propre destin, il y a très peu de temps, moins de 20 ans contre 40 pour les Jivaros.

Pensez-vous qu'il est vraiment bénéfique pour ces indiens de trop se faire connaître de notre monde occidental ?
Valery Grancher :
Si les Indiens choisissent de se faire connaître, ils maîtrisent à la fois les outils, les médias et leur image pour en tirer les meilleures bénéfices à leur endroit, à savoir continuer à vivre comme ils l'entendent. Si par ailleurs cette visibilité est subie et non volontaire comme cela a pu déjà arriver dans le passé pour certaines communautés, les conséquences sont souvent dramatiques sur le plan identitaire...

Etes-vous resté en relation avec la communauté Shiwiars ?
Valery Grancher :
Oui, pas plus tard que hier nous discutions de la finale de la coupe du monde et du geste de Zidane !

Qu'est-ce qui vous a le plus marqué dans toute cette expérience ?
Valery Grancher :
Les aspects universels de l'humain, quelque soit notre origine, nous avons au fond les mêmes désirs, enjeux sociaux et aspirations spirituelles, seules les formes diffèrent...

Pourriez-vous nous en dire plus au niveau de l'existentiel acquis lors de cette expérience ?
Ce que je dénomme comme expérience existentielle est la prise de conscience de la précarité de notre vie face à la nature dans sa complétude...

"Nous avons au fond les mêmes désirs, enjeux sociaux et aspirations spirituelles"
Pensez-vous vraiment qu'ils arrivent à maîtriser leur image ? N'est-ce pas un peu utopique tout ça ? Il me semble que les indiens sont en train de se retrouver avec les inconvénients de la vie "sauvage" et ceux de la vie "civilisée". Par exemple, avec les maladies européennes sans les médicaments européens.
Valery Grancher :
Je parle que d'un exemple, de celui que j'ai visité, car cela fait déjà quarante années que ces communautés agissent de cette façon et cela leur réussit plutôt bien. Mais il est vrai que les Huaronis en Equateur, ou les Yamonamis au Venezuela et au Brésil, ou les Kayapos, les situations sont beaucoup plus dramatiques et rejoignent ce que vous décrivez. Ce qui fait que ces Jivaros ont globalement une meilleure vie vient du fait qu'ils n'ont subi que très peu de contacts du fait de leur réputation diabolique : ils réduisaient encore des têtes, il y a dix années...

Ce qui veut dire que cela modifie votre comportement vis-à-vis de la nature ou vis-à-vis de l'humain en général ?
Valery Grancher :
En fait, je ne peux plus dissocier la nature de l'humain...

Votre expérience en Amazonie n'est elle pas une expérience ethnologique plus qu'artistique ?
Valery Grancher :
Elle est artistique dans le sens qu'il s'agit d'un regard subjectif sans valeur scientifique. L'ethnologie est une science qui consiste pour l'ethnologue à se fondre dans une communauté jusqu'à perdre ses propres référents pour vivre comme son sujet, et en faire la meilleure étude... Dans mon cas, je n'étais qu'un visiteur, je n'ai jamais été un membre de cette communauté...

Quelle est la vision des Shiwiars sur notre mode de vie occidental ?
Valery Grancher :
Ils nous perçoivent comme des aliénés pris dans des réseaux très complexes de dépendance à des objets (notre consommation)...

Quelle est la position de la femme au sein de la tribu ?
Valery Grancher :
Elle est l'égale de l'homme, l'homme et la femme ont chacun et chacune ses domaines de responsabilités et territoires et gare à celle ou celui qui les viole.

Aimeriez-vous aller vivre là-bas, dans cette communauté ?
Valery Grancher :
Non, cela serait une énorme charge pour eux, et je reste un étranger... Ils sont désormais mes amis, mais je préfère ne pas les gêner...

"Ils nous perçoivent comme des aliénés pris dans des réseaux très complexes de dépendance à des objets"
Avez-vous déjà envisagé écrire ?
Valery Grancher :
Oui, un livre va bientôt être publié à la suite de ce projet par le palais de Tokyo et les éditions Léo Scheer, normalement en Janvier 2007.

Quelle est l'œuvre produite au final ?
Valery Grancher :
Deux installations vidéos : 1 montrée au palais de Tokyo du 4 au 20 Novembre 2005, 1 montrée aux USA dans une exposition nommée "Global groove as nation building", deux films publiés sous formes de DVD, une émission de radio diffusée sur France Culture le 22 Janvier dernier. Une dizaine de peintures visibles sur www.theshiwiarsproject.org .

Pourquoi avoir pensé au plan séquence d'une longue durée ?
Valery Grancher :
Car je voulais définir une fenêtre vers ce lieux qui soit présente au Palais de Tokyo : Le temps local de l'exposition est synchronisé au temps du film : le film commence à 12h00, le palais de Tokyo ouvre à 12h00 ; il faisait nuit à 18h00 à Paris et il faisait nuit à 18h00 dans le film...

Vous êtes un aficionado de l'Internet ?
Valery Grancher :
Oui, depuis ses débuts en 1994-95, où avec des amis nous étions à l'origine de ce que l'on nomme aujourd'hui 'net art'.

Quelles sont vos créations sur Internet ?
Valery Grancher :
Vous pouvez toutes les voir sur http://www.nomemory.org .

Quelle est la nature d'une création sur Internet ? C'est totalement virtuel, non ?
Valery Grancher :
Cela peut être une œuvre qui se génère en réseaux par la contribution de divers internautes pour se matérialiser dans une exposition; ou encore, cela peut être une œuvre qui se crée et n'existe qu'en réseaux et est totalement virtuelle...

Quels sont vos prochains projets ?
Valery Grancher :
http://www.internetpainting.vg http://www.moneytogold.com et encore une nouvelle installation concernant l'Amazonie à la prochaine Nuit Blanche de Paris à la mairie du IVème.

Vous parlez de votre père qui avait observé les Shuars. Que fait votre père ? Ce goût de l'aventure est-il de famille ?
Valery Grancher :
Il est vrai que mon père avait visité avant ma conférence une communauté Shuar (une autre que celle que j'ai visité), et il m'a parlé de cette relation aux médias, et cela m'a énormément intéressé, vous connaissez la suite... mais oui le goût de l'aventure est un peu un "atavisme" dans notre famille.

"Mon regard a changé"
Comment êtes-vous "devenu" artiste ?
Valery Grancher :
En fait, au tout début, j'étais VJ, et un jour, des artistes contemporains m'ont expliqué que mes réalisations ressemblaient à de l'art contemporain, alors je me suis pris d'intérêt pour l'art contemporain et de fil en aiguille, je suis là où je suis, c'est un peu comme ces DJ qui ont fini à l'IRCAM.

Vos œuvres sont-elles en majorité virtuelles ou réelles?
Valery Grancher :
En fait, je questionne ce que je nomme le media situ (les contextes médiatiques en différents lieux), et du coup, je considère tous les outils de l'image comme médias : la peinture, la photo, la vidéo, Internet et le résultat est souvent hybride, virtuel / matériel.

Après une telle expérience, quel regard portez-vous sur la société contemporaine ?
Valery Grancher :
Mon regard a changé dans le sens que désormais je sais que quand je consomme 1 litre d'essence, je peux tuer en même temps deux ou trois indigènes dans une forêt victimes de milices à la solde de Texaco ou BP...ou Shell.

Qu'avez-vous mangé là-bas ?
Valery Grancher :
Du toucan, du tapir, du poisson chat, des ignames, des eddos, de la truite, et diverses racines, tout cela donne de très bons bouillons qui ont d'ailleurs été servi au Palais de Tokyo, il y a une dizaine de jours.

Comment s'est déroulé le voyage de Pascual à Paris ?
Valery Grancher :
Très bien, il était très à l'aise, beaucoup plus que moi dans sa forêt, ce qui nous a tous grandement surpris, il était très autonome !!!

Comptez-vous y retourner ?
Valery Grancher :
Peut-être un jour, si ils en formulent la demande... car un séjour chez eux est une charge énorme, ils vivent en totale autarcie avec un équilibre écologique très précaire...

Quelles autres expériences artistiques avez-vous vécu avant celle-ci ?
Valery Grancher :
Des expériences extra terrestres : par exemple, j'ai réussi à squatter la sonde Cassini qui est allée sur Titan, en spammant de mes messages le CD ROM qui était embarquée sur cette sonde ...

Pascual était-il déjà allé dans une ville avant ?
Valery Grancher :
Oui, en Equateur, à Quito, Puyo, pour défendre la cause de sa communauté : la récupération et la légalisation des territoires ancestraux qui se trouvent de part et d'autres de la frontière Equateur et Pérou...

"je me suis fait piqué par une mygale"
N'avez-vous jamais eu peur là-bas ?
Valery Grancher :
Les premiers jours, j'ai vraiment craint pour ma vie, je me suis fait piqué par une mygale dans le dos et j'ai cru y passer, d'où mon expérience "existentielle" sur la précarité de notre existence dans la nature.

Avez-vous de nouveaux projets de voyages ?
Valery Grancher :
Oui, j'aimerais bien aller dans des territoires vierges comme l'Antarctique, s'il l'est toujours, mais cela est une autre histoire...

Quel est votre projet artistique le plus fou ?
Valery Grancher :
J'essaye de ne jamais faire des projets fous mais extrêmes avec une grande rationalité et pragmatisme, il en va de ma survie... mais je penses surtout à mes projets dans l'espace comme l'acquisition légale de territoires sur la lune, ou la présence d'un de mes ready made sur Mars : http://www.nomemory.org/data2/mars

Ohhh et comment ont-ils soigné votre piqûre de mygale ?
Valery Grancher :
Avec des tisanes anti-venins et des argiles sur la piqûre... Je n'en sais pas plus...

Seriez-vous prêt à faire "n'importe quoi"pour l'amour de l'art ?
Valery Grancher :
Non, il faut toujours que ces projets, si ils impliquent d'autres personnes ou communautés leur apporte un bénéfice.

Vous considérez-vous comme quelqu'un d'original ?
Valery Grancher :
Non pas du tout, je ne fais que vivre dans le monde qui nous entoure.

Quel métier exerceriez-vous si vous n'étiez pas artiste ?
Valery Grancher :
Du fait de mon background universitaire, ingénieur télécom.

Recommanderiez-vous aux internaute une telle expérience ? Pourquoi ?
Valery Grancher :
Pas forcément, mais je recommande aux internautes de s'intéresser aux minorités et aux pays économiquement pauvre pour éviter une fracture numérique dans notre monde global.

Valery Grancher : Je vous remercie tous, vous pouvez en savoir plus sur ce projet à cette adresse : http://www.theshiwiarsproject.org. Mille mercis pour votre attention.