28 octobre 2005

Jungle



Le soir, les images, les sons et les effluves de la jungle ne cessent de me hanter lors de mon coucher. Car c'est le seul endroit que je connaisse où vous pouvez aisément trouver une vue, un panorama où rien ne laisse paraître une intervention humaine, pas même les lignes blanches et scintillantes dessinées par nos jets dans les cieux.
Juste soi, face à un désordre organique qui vous carresse dont même l'air se fait matière: son humidité, sa densité, sa richesse oxygénée vous carresse le corps et vos poumons d'une façon si sensuelle.
Je ne peux décrire la sensation que l'on ressent lorsque lors de la tombée de la nuit, on prend son bain dans la rivière en faisant face à son cours et ses berges devenant hautes et sombres et disparaissant dans la lumière crépusculaire et les limbes brumeuses s'échappant des cimes.
Pas de noir, mais de la couleur cacao de l'eau, au ceruleum virant à l'outremer du ciel ruisselant sur les veines jades, porphyres, émeraudes et saphires de la forêt, vous ressentez la communion et la plénitude: aucun tourment mental, aucune angoisse, juste vous, un corps parmi d'autres, une petite vie perdue dans l'immense biodiversité, et une humilité souriante vous envahit.
De ma vie je n'aurais jamais senti un air si pur, pas une odeur nauséabonde, juste les parfums organiques des plantes, le musc des animaux, et l'humidité ambiante ayant sa propre saveur quand on daigne ouvrir la bouche et tirer la langue comme le font les petits enfants shiwiars.
Face à ces impressions, je ne cessais de me dire comment le douanier Rousseau avec "la charmeuse de serpents" avait si bien su retranscrire cela picturalement sans jamais s'être rendu dans de tels endroits ?

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