30 septembre 2005

l'amazonie et les territoires égotiques...



Depuis que j'ai débuté ce projet, dans le cadre de mes recherches et investigations, j'ai eu à faire à tous types de personnes dont je taierai les noms par courtoisie...

Tout d'abord des personnes ouvertes, bienveillantes qui vous écoutent, vous éveillent avec intelligence sur vos erreurs et maladresses potentielles, vous font prendre conscience de la complexité du domaine que vous abordez et vous apprennent la modestie en les abordant. Ces personnes peuvent être des universitaires brillants, des humanistes animant, et, s'occuppant d'ONG, ou d'associations humanitaires; ou encore, des indigènes, et des responsables de confédérations d'indigènes, qui vous manifestent une gentillesse et un dévouement hors du commun... Alors en vous nourrissant de ces rencontres vous dessinez les différents chemins de votre future expérience... Vous voyagez mentalement en vous nourrissant de leurs expériences... et vous découvrez un monde fascinant, stimulant, complexe ou aucune évidence n'existe, et un sentiment prédomine au regard de ce que vous abordez, l'humilité...

Et puis vous avez ceux qui font du vacarme, que vous voyez dans les premières lignes des moteurs de recherche quans vous tapez "jivaros" ou "amazonie", qui vous parlent de commerces équitables, ont des stands dans des salons de l'industrie du tourisme :
Cela va du fou furieux (gourou) qui harcèle votre entourage, appelle vos rdv avant que vous les rencontriez, vous envoie des émissaires pour vous convaincre que vous êtes inintelligent, inexpérimenté et que ce cher gourou sera votre passage obligé, car il est l'autorité suprême en ce qui concerne l'amazonie, pour moultes raisons (y avoir séjourné longtemps, y être allé plusieurs fois).
Evidemment cette aide n'est pas inintéressée et gratuite: il faut qu'il vous accompagne, vous devez lui payer son voyage, citer ses livres, et surtout souscrire à ses stages chamaniques en nos contrées tempérées contre rétribution, puis adhérer à son association, et subir une immersion en amazonie avec prise d'AYAHUASCA et tout cela en troupeau de 12 personnes toutes plus "azimutées" les unes que les autres en quête de vérités spirituelles qui seraient plus évidentes au coeur de la jungle.
Naturellement vous mettez les voiles, continuez vos investigations et puis le projet devient visible, concret, et là seconde salve:
En effet, le gourou vous contacte et vous explique que rien n'aurait été possible sans lui, que vous êtes un ingrat et que vous devriez le citer par courtoisie.... l'impliquer...
Et puis vous avez ceux, qui s'approche de vous afin de vous rallier à leur cause, et affichent dés la première phrase un catalogue de diplômes tous plus exotiques les uns que les autres, qu'ils auraient obtenu, et vous déclarent ipso facto forfait (vous n'avez pas le droit de réaliser un tel projet) tout simplement, comme la premières fois, on vous dit "tu n'y as pas vécu, tu ne connais rien, tu ne peux en parler"....
Bref dans les deux cas, vous faites face à des réseaux de certitudes, très différents dans les deux cas, mais vous avez en face de vous deux 'ayatollahs' dressés sur leurs territoires mentaux nommés "AYAHUASCA" ou "Amazonie", et rien ne saurait exister en dehors de ces territoires fantasmés, le tout armé d'une rhétorique à toutes épreuves censée vous plonger dans le plus grand doute afin de vous faire tomber dans leurs bras...
Forcément, animé de réseaux de questions qui en amènent d'autres, je les conforte dans leurs certitudes.
Ce que je trouve fascinant est que l'amazonie, ce terme là, le droit d'en parler, ou d'écrire à son sujet, nécessiterait de votre part un rite initiatique, vous devez être initié !

Il ne faut surtout pas être un touriste, encore moins s'animer de questions, et encore moins, parler de cette région avec des incertitudes ou des questions...
Et ce qui me fascine chez ces personnes est leur arrogance, ils s'attribuent une position de "pater" contre rémunération, et, vous revendront un voyage en groupe avec un tour operator conciliant...
Je n'ai jamais connu une destination qui suscite une telle attitude:
Si vous allez en Inde, au Népal, en Afrique, en Asie, jamais vous croiseriez des personnes qui agitent autant, en parlant de votre future destination, d'angoisses (le danger que peuvent représenter les indigènes que vous allez visiter (ne sont ils pas primitifs?)) et de fantasmes (voir de vrais indigènes non acculturés dans leur vrai mode de vie, faisant de jolies peintures sur écorces)...
Je me rappelle être allé en Indonésie, où vous pouvez rencontrer des papous, et à ce sujet, je n'ai jamais eu ce genre d'expériences préalables à leur rencontre.

Bref, réaliser un voyage en amazonie cristallise un réseaux de fantasmes et de territoires égotiques hallucinant, et je dois dire que l'une des premières surprise lors de la conception de ce projet fût celle là...
De tels individus sucitent en vous une vraie curiosité 'zoologique', à dix mètres de chez vous, au bas de votre porte, à votre téléphone.
Cela est tout simplement fascinant et pas moins intéressant au sujet de notre société...

Car la vraie nature de ce projet est simple:
Questionner l'art en dehors du champ de l'art, en dehors du gap (exposé précédemment) existant entre culture et monde...
Questionner l'art dans une humanité qui n'entretient aucune distance avec la nature...

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