18 juin 2008

"Du Jardin au Cosmos..." Espace d'Art Concret de Mouans Sartoux


Extrait de l'installation présentée "Angelus"

J'ai le plaisir de vous inviter à ma prochaine exposition:
- "Du Jardin au Cosmos" 29 Juin 2008 - 4 Janvier 2009 exposition collective avec Darren Almond, Robert Barry, Joseph Beuys, Michel Blazy, Hamish Fulton, Wolfgang Laib, Jean-Luc Moulène, Melik Ohanian, Gyan Panchal, Giuseppe Penone, Robert Smithson et d'autres... Commissaire: Jean Marc Avrilla. Espace d'Art Concret, Mouans Sartoux, France.

Concept de l'exposition:
La nature est à nouveau au centre de nos préoccupations. La relation que les hommes ont développée à son égard n'est pas seulement variable dans le temps, elle l'est également selon les cultures. Cette relation culturelle à la nature est particulièrement sensible dans l'art. C'est pourquoi, à l'occasion du réaménagement du parc du château par Gilles Clément et du lancement de notre partenariat avec la Bastide du Parfumeur, nous avons souhaité présenter une sélection d'oeuvres évoquant le rapport que les artistes instituent avec la nature.

Loin d'être une exposition consacrée au Land art ou un panorama complet de l'utilisation de la nature dans l'art, cette exposition entend montrer, à partir d'un choix limité d'oeuvres, les modes de relation que nous, contemporains, tissons avec la Nature au sens large, ce milieu au sein duquel l'espèce humaine a évolué. Cette exposition s'offre comme un parcours, des jardins à la française comme principe de mesure et de géométrisation de la terre, à l'espace ouvert sur le cosmos et la conscience de la matérialité et de l'organisation de l'univers. Nous n'oublierons pas la vision romantique d'un espace naturel vierge de toute présence humaine, pour mieux montrer que, au-delà de la construction de notre imaginaire, l'environnement est en permanence modifié par l'homme. Cette exposition témoigne qu'il existe depuis les années 60 une sensibilité très grande des artistes contemporains à la nature, aux liens tissés avec elle et à leurs bouleversements, mais aussi que ce champ de l'art, par-delà la diversité des approches artistiques, répond à une structuration plus fondamentale de la relation de l'humanité à la nature.

A l'heure où les questions environnementales nous amènent à nous interroger sur notre lien à notre milieu, à la planète, cette exposition tente de déchiffrer, avec les oeuvres d'art, l'imaginaire que nous projetons sur la nature.

Commissariat d'exposition: Jean-Marc Avrilla

Espace de l'Art Concret, Château de Mouans - 06370 Mouans-Sartoux. Tél.: +33 (0)4 93 75 71 50.
Horaires d'ouverture hiver (jusqu'au 30 juin): du mercredi au dimanche de 12h à 18h.
Horaires d'ouverture été (du 1er juillet au 31 août): tous les jours de 11h à 19h

Vernissage 29 Juin 2008

16 avril 2008

Brève sur libération



Une brève sur libération qui en dit très long sur la conditions des peuples natifs d'amazonie...

"Une femme indigène porte son enfant tout en tentant de résister à la police brésilienne qui expulse quelque 200 membres du Mouvement des sans-terre en Amazonie. Les paysans sans terre tentent en vain de résister à l'expulsion armés d'arcs et de flèches contre les forces de police utilisant des gaz lacrymogènes et des chiens dressés."

14 mars 2008

Un article sur le projet

Vous trouverez ci-après un article d'Anne Kawala sur ce projet, que j'ai trouvé par hasard sur la toile, je ne sais de quand il date...

"Depuis le 1er septembre, Valéry Grancher tient le weblog du projet développé en partenariat avec le Palais de Tokyo: The Shiwiars Project. Un weblog, Valéry Grancher, artiste dont le médium numérique est celui de prédilection : tout semble normal. Sauf que ce weblog, à partir du 9 octobre prochain sera tenu du fin fond de la Haute Amazonie, vers Quito, où l’artiste se rend pour quelques deux semaines. Il part s’immerger, « faire l’expérience d’une sorte d’idiorythmie » dans l’une des dernières tribus de «réducteurs de tête », tenter de tisser un lien d’une nature a priori improbable : il y a opposition jusqu’au conceptions cosmogoniques, jusqu’à la notion de réalité. Et pourtant...

Les Shuars sont, et Valéry Grancher le souligne dans son blog, un peuple dont l’importance au sein de leur pays est majeure : ils ont résisté et résistent encore à la colonisation, opposant au capitalisme ses propres armes (l’anecdote au sujet de l’ayahuasca est révélatrice.).
Si l’exploitation et la destruction de la forêt amazonienne menacent leurs territoires, il n’en reste pas moins que les tribus indiennes le protègent et le valorisent. Leur résistance adaptée à notre système n’évince en rien leurs valeurs ancestrales.

Le dispositif initial était technologiquement ambitieux, – il consistait en une retransmission permanente au palais de Tokyo, d’un flux d’images prises en direct au moyen de trois caméras -, mais humainement controversable. Valéry Grancher énonce lui-même ce problème sur son weblog :

« Au delà du problème technique, il se posait la question de l'écologie humaine du projet dans la communauté Tanguntsa:
Comment un tel dispositif (tout de même lourd) allait être perçu par les indigènes et quelles conséquences cela aurait sur eux?
Je n'avais pas de réponse à cette question et je n'en ai toujours pas...
Ce qui rendait cette première version du projet encore plus suspecte à mes yeux:
J'arrivais chez eux avec mes gros sabots techno, et repartais en laissant un dispositif totalement étranger dans leur paysage: trois yeux électroniques. Quand on connaît le mode de vie des shuars, qui attribuent une symbolique et une vie spirituelle à tous les objets de leur quotidien, quel effet aurait cet intrus technologique dans leur environnement spirituel?
Du coup, la seule solution et la seule règle d'or qui ressort de tout cela, est la discrétion, je serai un invité chez eux et devrai me tenir en tant que tel. L'experience que je vivrai deviendra une pièce à mon retour, à Paris, mais cette expérience ne saurait interférer sur leur mode de vie. A leurs yeux je ne serai qu'un visiteur parmi d'autres et rien de plus... »

En lieu et en place, il souhaite désormais faire la capture filmique/photographique d’une journée dans un village Shiwiar (le dispositif précis, des sources d’énergies non polluantes au matériel anti-humidité est détaillée sur son weblog). Soit, calcule-t-il plus un tétra Giga octets de données, qu’il traitera, montera, à son retour en France.

La vidéo sera présentée au palais de Tokyo, second volet de ce projet, du 26 octobre au 13 novembre. Cette exposition s’ouvrira par un colloque que donnera Valéry Grancher, accompagné d’un responsable d’un village Shuar et de personnes hautement impliquées dans la lutte pour la protection de ces territoires.

Ainsi Valéry Grancher, explorateur et acteur du continent sans cesse en mouvement qu’est Internet, transpose, avec The Shiwiars Project, ses recherches virtuelles d’interactivité, d’interrelations et d’explorations fantasmées de l’inaccessible ( de Heart time/ time Heat, 2001 à Found Sculpture on Mars, 2005 ) à notre conception du réel. Mais par rapport à celle des Shuars ? Où se situe l’inaccessible ? Et si les propositions se renversaient ?

Il pose, avec ce projet, à nouveau cette question, au coeur des problématiques de l’art contemporain : quelle est valeur du film documentaire en tant qu’œuvre d’art ?

Mais aussi la question de la valeur de l’expérience physique, du savoir, et de la transmission d’un savoir expérimenté : possible ou impossible ?

La valeur économique et politique que représente Valéry Grancher dans un tel contexte, n’est-elle pas la seule qu’intéressent les Shuars ? Le shaman en chef, avec lequel est en contact mailValéry Grancher, ne l’a-t-il pas sonder, au sujet des Tzantza, ces têtes réduites, pour savoir si cela l’intéresserait ? Ne vaut-il pour eux, qu’un touriste supplémentaire, à la fois excité et terrorisé par les pratiques «magiques » ? Tout cela serait légitime de la part d’un peuple duquel l’enjeu est la survie. Mais alors quel lien établir, même en tant qu’observateur ? Comment ce shaman présente-t-il le projet à cette tribu de 18 habitants dans laquelle Valéry Grancher habitera lors de ces deux semaines ?

L’humanité, la délicatesse, la douceur, la lenteur devront être de mises pour que ce projet ne soit pas une sorte de mission ethno-économique, mais un véritable partage, ce lien que rêve de tisser Valéry Grancher. Laissons-en lui le soin, comme celui de le nous transmettre à son retour grâce, et sans asservissement, aux moyens technologiques qu’il sait si bien manier.



Valéry Grancher : www.theshiwiarsproject.org ; www.nomemory.org

Anne Kawala"

Je profite de ce billet pour vous annoncer qu'une nouvelle installation vidéo dans la suite de ce projet est en cours de production et sera présentée à l'exposition "Du jardin au Cosmos" l'été 2008 à l'espace d'Art Concret de Mouans Sartoux...

Valéry Grancher

04 août 2007

TAWASAP



J'avais promis à Pascual Kunchicuy d'amener sa couronne de plume au Pôle Nord, promesse tenue le 14 Mai 2007 à 12H00 au 79° Nord et 12° Est.
Quand l'équateur se confond avec le Pôle. Ainsi la première performance planifiée entre un shiwiars et un artiste occidental fut faite...

Valéry Grancher

17 juin 2007

Courrier International hors série Juin - Juillet 2007




Je ne saurais que trop recomander la lecture du dernier hors série du Courrier International de Juin-Juillet 2007:
- De l'arctique à la Terre de feu.
"Fiers d'être indiens"
Vous savez à quel point la cause indigène est chère à mon coeur, à l'heure de la globalisation et de la marchandisation universelle...
Ce numéro représente une brillant exposé lucide sur la condition des indigènes à ce jour, tant sur le plan de la Politique, les identités que la Culture.

Attention !
Le racisme à l'envers ne résoudra rien ! Poser les problèmes d'Amérique latine en terme de race est d'une iresponsabilité insensée... Parler d'indiens purs et de blancs purs est fallacieux !
Lire le texte de Mario Vargas Llosa
La question centrale est d'ordre du "vivre ensemble" et du respect mutuel !

Courrez à votre kiosque !!!

08 décembre 2006

Ny Alesund Pole 0


Voilà c'est fait ! j'ai remporté l'appel à projet artistique organisé par Art aux Pôles et l'ipev (l'institut polaire Paul Emile Victor) annoncé sur le site internet du Palais de Tokyo dont le jury réunissait les personnes suivante:
Caroline Bourgeois (le Plateau), Marc Sanchez (Palais de Tokyo), Françoise Vincent et Elohim Feria (Art aux Pôles), Alain Lesquer (Institut Polaire Paul Emile Victor).
Ainsi durant l'été polaire dans le cadre de la quatrième année polaire, je vais effectuer un séjour dans la base scientifique franco allemande nommée Cordel, pour réaliser un projet artistique à Ny Alesund dans le Svalbard !
125 ans après la première Année polaire internationale, et, 50 ans après l'Année géophysique internationale, la communauté scientifique internationale s'apprête à organiser la quatrième Année polaire internationale de Mars 2007 à Mars 2008.
Nul doute que cette année va focaliser bon nombre de feux médiatiques sur les enjeux scientifiques, climatiques, stratégiques, énergétiques, politiques liés à ces territoires et pourquoi pas artistiques ?
Ainsi mon projet se nommera "Ny Alesund Pôle 0" !
Je ne dévoilerai pas de suite la nature exacte de ce projet artistique, mais je dois dire que se rendre en Amazonie en Equateur sur la ligne d'Equateur, c'est un peu la même chose que d'aller au Pôle nord: ce sont les deux extrêmes de notre sphère terrienne.
Au gré de l'avancé de ce projet, tout au long des semaines et jours à venir, ce blog (http://www.ny-alesund-poleO.org) se nourrira de textes et d'images saisie via une webcam (l'image agrémentant ce post est transmise en temps réel !)
Ainsi la réalité de la génèse de ce projet se juxtaposera à la réalité de la topographie de ce locus lointain.

29 octobre 2006

Vers le sol ...



Atterrir en Amazonie vous garantit des sensations fortes, car rien n'est certain et tout est dangereux...

Valéry Grancher

Une journée comme les autres...



Le shiwiars sont avant tout des ruraux comme on peut le voir dans cette vidéo, si ils chassent, ils ne cultivent pas moins. Et dans cette société l'agriculture est une activité importante dans le quotidien. Par ailleurs ils est très impressionnant de voir le nombre d'espèces végétales amzoniennes cultivées...

Valéry Grancher

Une marche au plus profond de la jungle



Il s'agit d'une marche avec Pascual et le Chef Gonzalo, au plus profond de la jungle amazonienne dans le pastaza...

Valéry Grancher

Le maquillage d'un chef shiwiar



Cette vidéo fut prise lors du maquillage du chef de la communauté de Tanguntsa, le dessin sur son visage représente l'animal dont il a rêvé: En effet pour toutes les communautés jivaros le rêve est la réalite suprême, et le réel tel que nous le définissons n'est qu'apparence et n'est pas la réalité profonde.
Aussi lors de ces rêves, les animaux rêvés sont des âmes nobles dont il est nécessaire de s'attribuer les attributs au petit matin, et cela se fait par le maquillage facial qui peut représenter un ocelot, un python, un singe ect...
Dans le cas présent Gonzalo se pare des attributs du python...

Valéry Grancher

20 septembre 2006

Les dégats de la France en Equateur: Perenco



Ce jour j'ai reçu un email d'Hélène Bannier, qui m'avait interviewé sur radio pulsar et qui a réalisé ce documentaire cet été en Orellana en Equateur, toujours en amazonie....
Il s'agit cette fois des peuples quichuas...

"Cela faisait longtemps que je ne n'étais pas venue visiter votre blog.
Je me disais que ça vous intéresserait peut-être de prendre connaissance de ce doc réalisé cet été dans l'Orellana, dans les concessions d'une compagnie francaise, Perenco

http://helene.bannier.free.fr/l-or-sale-documentaire-sonore.mp3

à bientôt, en espérant que ce lien fonctionne!"


Bref je vous invite à l'écouter sur ce lien: Cela est édifiant et vraiment, pensez y quand vous allumez le moteur de votre voiture:
Cela fait vingt ans que je refuse de passer le permis B pour cette raison exactement...

Le responsable de cette horreur: Perenco, société française bien de chez nous !!!

10 septembre 2006

Un panorama




Je ne pouvais m'empêcher de le publier une fois terminé:
Voilà un panorama réalisé par interpolation numérique ;-)
Il représente le Pastaza avant d'arriver à Puyo, ce fleuve qui nourrit toute la région des shiwiars au travers de ses divers rios, et ramifications...
Vous remarquerez à quel point le niveau de l'eau est bas: On ne devrait pas voir un seul gravier, et on est en plein début des saisons des pluies. Cette sécheresse à deux causes:
- Le barrage en amont qui diminue le débit
- Le réchauffement climatique qui agit sur les précipitations en amont sur la cordillère des Andes, et cela de façon directe.
Le résultat est que la jungle en aval en subit également les conséquences: baisse du niveau des rios, diminution du taux d'humidité au plus profond de la jungle et tout cela agit de façon négative sur la biodiversité...
Les images cachent bien des choses...

05 septembre 2006

Le Chat



Cet été, linternaute.com a organisé un chat en leur locaux, j'ai le plaisir de publier ici la transcription de cette itw faite par les internautes au sujet de ce projet :

"L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète".

Depuis les coins les plus reculés d'Amazonie, d'un petit village nommé Tanguntsa, Valéry Grancher nous a ramené images, vidéo et une histoire émouvante. Il est venu nous parler de ce "Shiwiars Project".

La retranscription du chat

Vous travaillez souvent avec le Palais de Tokyo ?
Valery Grancher :
Assez souvent, depuis deux années.
Comment êtes-vous rentré en contact avec les indiens ? Aviez-vous un interprète ?
Valery Grancher : Le contact s'est établi via leur confédération politique dont le chef fut mon interlocuteur, guide et interprète : Pascual Kunchicuy Carrasco.

"L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète"
Combien de temps êtes-vous resté en Amazonie ?
Valery Grancher :
Dans la communauté, je suis resté 6 jours, et en Amazonie 12 jours.

De quelle manière avez-vous été accueilli par les Shiwiars ?
Valery Grancher :
De façon extrêmement cordiale, et solennelle à la fois, j'ai eu droit à une cérémonie à mon arrivée et avant mon départ pour mon retour en France.

Comment est né ce projet ?
Valery Grancher :
Ce projet est né suite à une conférence faite au Palais de Tokyo sur le Wi-Fi durant laquelle je citais des exemples d'utilisations de ce type de réseaux par des populations indigènes dans le monde. Et le meilleur exemple est l'exemple amazonien. Le Palais de Tokyo me proposait alors de penser un projet...

Pourquoi avoir choisi l'Amazonie ?
Valery Grancher :
L'Amazonie est un des endroits les plus extrêmes de la planète, et représente à la fois une histoire de cinq siècles de résistance culturelle face aux diverses colonisations. Il représente la plus longue histoire en ce qui concerne le rapport entre les technologies de l'information et ces populations : les Shuars (jivaros comme les shiwiars) ont dès les années 60 réalisé des réseaux radio pour arriver aujourd'hui aux réseaux Internet...

Quel était l'objectif de ce voyage ?
Valery Grancher :
Etablir un lien entre deux mondes qui ne sont pas censés se rencontrer : le monde de l'art contemporain et cette communauté.

Je voudrais savoir ce qui vous a posé le plus de problèmes d'adaptation ?
Valery Grancher :
Ce sont surtout des problèmes physiques : fatigue, résistance aux conditions locales, sanitaires et climatologiques.

Aviez-vous déjà vécu dans une tribu avant cette expérience en Amazonie ?
Valery Grancher :
Jamais.

Que vous a apporté cette expérience en Amazonie ?
Valéry Grancher:
Elle m'a apportée une expérience existentielle, et elle leur a apporté une plus grande visibilité.

"Etablir un lien entre deux mondes qui ne sont pas censés se rencontrer"
Comment expliquez vous l'avancée technologique en Equateur ? Est-ce dû à l'action d'un FAI qui y a vu un marché porteur ?
Valery Grancher :
Le contexte est très différent, les confédérations politiques indigènes (pour ce qui est des jivaros comme les shiwiars) ont dès les années 60 bénéficié des technologies au contact des prospecteurs pétroliers et évangélistes et ont su les détourner à des fins politiques pour leurs propres usages. Ils ont inspiré les sandinistes du Nicaragua et les Zapatistes du Chiapas. Mais les Yamonamis ont pris en main leur propre destin, il y a très peu de temps, moins de 20 ans contre 40 pour les Jivaros.

Pensez-vous qu'il est vraiment bénéfique pour ces indiens de trop se faire connaître de notre monde occidental ?
Valery Grancher :
Si les Indiens choisissent de se faire connaître, ils maîtrisent à la fois les outils, les médias et leur image pour en tirer les meilleures bénéfices à leur endroit, à savoir continuer à vivre comme ils l'entendent. Si par ailleurs cette visibilité est subie et non volontaire comme cela a pu déjà arriver dans le passé pour certaines communautés, les conséquences sont souvent dramatiques sur le plan identitaire...

Etes-vous resté en relation avec la communauté Shiwiars ?
Valery Grancher :
Oui, pas plus tard que hier nous discutions de la finale de la coupe du monde et du geste de Zidane !

Qu'est-ce qui vous a le plus marqué dans toute cette expérience ?
Valery Grancher :
Les aspects universels de l'humain, quelque soit notre origine, nous avons au fond les mêmes désirs, enjeux sociaux et aspirations spirituelles, seules les formes diffèrent...

Pourriez-vous nous en dire plus au niveau de l'existentiel acquis lors de cette expérience ?
Ce que je dénomme comme expérience existentielle est la prise de conscience de la précarité de notre vie face à la nature dans sa complétude...

"Nous avons au fond les mêmes désirs, enjeux sociaux et aspirations spirituelles"
Pensez-vous vraiment qu'ils arrivent à maîtriser leur image ? N'est-ce pas un peu utopique tout ça ? Il me semble que les indiens sont en train de se retrouver avec les inconvénients de la vie "sauvage" et ceux de la vie "civilisée". Par exemple, avec les maladies européennes sans les médicaments européens.
Valery Grancher :
Je parle que d'un exemple, de celui que j'ai visité, car cela fait déjà quarante années que ces communautés agissent de cette façon et cela leur réussit plutôt bien. Mais il est vrai que les Huaronis en Equateur, ou les Yamonamis au Venezuela et au Brésil, ou les Kayapos, les situations sont beaucoup plus dramatiques et rejoignent ce que vous décrivez. Ce qui fait que ces Jivaros ont globalement une meilleure vie vient du fait qu'ils n'ont subi que très peu de contacts du fait de leur réputation diabolique : ils réduisaient encore des têtes, il y a dix années...

Ce qui veut dire que cela modifie votre comportement vis-à-vis de la nature ou vis-à-vis de l'humain en général ?
Valery Grancher :
En fait, je ne peux plus dissocier la nature de l'humain...

Votre expérience en Amazonie n'est elle pas une expérience ethnologique plus qu'artistique ?
Valery Grancher :
Elle est artistique dans le sens qu'il s'agit d'un regard subjectif sans valeur scientifique. L'ethnologie est une science qui consiste pour l'ethnologue à se fondre dans une communauté jusqu'à perdre ses propres référents pour vivre comme son sujet, et en faire la meilleure étude... Dans mon cas, je n'étais qu'un visiteur, je n'ai jamais été un membre de cette communauté...

Quelle est la vision des Shiwiars sur notre mode de vie occidental ?
Valery Grancher :
Ils nous perçoivent comme des aliénés pris dans des réseaux très complexes de dépendance à des objets (notre consommation)...

Quelle est la position de la femme au sein de la tribu ?
Valery Grancher :
Elle est l'égale de l'homme, l'homme et la femme ont chacun et chacune ses domaines de responsabilités et territoires et gare à celle ou celui qui les viole.

Aimeriez-vous aller vivre là-bas, dans cette communauté ?
Valery Grancher :
Non, cela serait une énorme charge pour eux, et je reste un étranger... Ils sont désormais mes amis, mais je préfère ne pas les gêner...

"Ils nous perçoivent comme des aliénés pris dans des réseaux très complexes de dépendance à des objets"
Avez-vous déjà envisagé écrire ?
Valery Grancher :
Oui, un livre va bientôt être publié à la suite de ce projet par le palais de Tokyo et les éditions Léo Scheer, normalement en Janvier 2007.

Quelle est l'œuvre produite au final ?
Valery Grancher :
Deux installations vidéos : 1 montrée au palais de Tokyo du 4 au 20 Novembre 2005, 1 montrée aux USA dans une exposition nommée "Global groove as nation building", deux films publiés sous formes de DVD, une émission de radio diffusée sur France Culture le 22 Janvier dernier. Une dizaine de peintures visibles sur www.theshiwiarsproject.org .

Pourquoi avoir pensé au plan séquence d'une longue durée ?
Valery Grancher :
Car je voulais définir une fenêtre vers ce lieux qui soit présente au Palais de Tokyo : Le temps local de l'exposition est synchronisé au temps du film : le film commence à 12h00, le palais de Tokyo ouvre à 12h00 ; il faisait nuit à 18h00 à Paris et il faisait nuit à 18h00 dans le film...

Vous êtes un aficionado de l'Internet ?
Valery Grancher :
Oui, depuis ses débuts en 1994-95, où avec des amis nous étions à l'origine de ce que l'on nomme aujourd'hui 'net art'.

Quelles sont vos créations sur Internet ?
Valery Grancher :
Vous pouvez toutes les voir sur http://www.nomemory.org .

Quelle est la nature d'une création sur Internet ? C'est totalement virtuel, non ?
Valery Grancher :
Cela peut être une œuvre qui se génère en réseaux par la contribution de divers internautes pour se matérialiser dans une exposition; ou encore, cela peut être une œuvre qui se crée et n'existe qu'en réseaux et est totalement virtuelle...

Quels sont vos prochains projets ?
Valery Grancher :
http://www.internetpainting.vg http://www.moneytogold.com et encore une nouvelle installation concernant l'Amazonie à la prochaine Nuit Blanche de Paris à la mairie du IVème.

Vous parlez de votre père qui avait observé les Shuars. Que fait votre père ? Ce goût de l'aventure est-il de famille ?
Valery Grancher :
Il est vrai que mon père avait visité avant ma conférence une communauté Shuar (une autre que celle que j'ai visité), et il m'a parlé de cette relation aux médias, et cela m'a énormément intéressé, vous connaissez la suite... mais oui le goût de l'aventure est un peu un "atavisme" dans notre famille.

"Mon regard a changé"
Comment êtes-vous "devenu" artiste ?
Valery Grancher :
En fait, au tout début, j'étais VJ, et un jour, des artistes contemporains m'ont expliqué que mes réalisations ressemblaient à de l'art contemporain, alors je me suis pris d'intérêt pour l'art contemporain et de fil en aiguille, je suis là où je suis, c'est un peu comme ces DJ qui ont fini à l'IRCAM.

Vos œuvres sont-elles en majorité virtuelles ou réelles?
Valery Grancher :
En fait, je questionne ce que je nomme le media situ (les contextes médiatiques en différents lieux), et du coup, je considère tous les outils de l'image comme médias : la peinture, la photo, la vidéo, Internet et le résultat est souvent hybride, virtuel / matériel.

Après une telle expérience, quel regard portez-vous sur la société contemporaine ?
Valery Grancher :
Mon regard a changé dans le sens que désormais je sais que quand je consomme 1 litre d'essence, je peux tuer en même temps deux ou trois indigènes dans une forêt victimes de milices à la solde de Texaco ou BP...ou Shell.

Qu'avez-vous mangé là-bas ?
Valery Grancher :
Du toucan, du tapir, du poisson chat, des ignames, des eddos, de la truite, et diverses racines, tout cela donne de très bons bouillons qui ont d'ailleurs été servi au Palais de Tokyo, il y a une dizaine de jours.

Comment s'est déroulé le voyage de Pascual à Paris ?
Valery Grancher :
Très bien, il était très à l'aise, beaucoup plus que moi dans sa forêt, ce qui nous a tous grandement surpris, il était très autonome !!!

Comptez-vous y retourner ?
Valery Grancher :
Peut-être un jour, si ils en formulent la demande... car un séjour chez eux est une charge énorme, ils vivent en totale autarcie avec un équilibre écologique très précaire...

Quelles autres expériences artistiques avez-vous vécu avant celle-ci ?
Valery Grancher :
Des expériences extra terrestres : par exemple, j'ai réussi à squatter la sonde Cassini qui est allée sur Titan, en spammant de mes messages le CD ROM qui était embarquée sur cette sonde ...

Pascual était-il déjà allé dans une ville avant ?
Valery Grancher :
Oui, en Equateur, à Quito, Puyo, pour défendre la cause de sa communauté : la récupération et la légalisation des territoires ancestraux qui se trouvent de part et d'autres de la frontière Equateur et Pérou...

"je me suis fait piqué par une mygale"
N'avez-vous jamais eu peur là-bas ?
Valery Grancher :
Les premiers jours, j'ai vraiment craint pour ma vie, je me suis fait piqué par une mygale dans le dos et j'ai cru y passer, d'où mon expérience "existentielle" sur la précarité de notre existence dans la nature.

Avez-vous de nouveaux projets de voyages ?
Valery Grancher :
Oui, j'aimerais bien aller dans des territoires vierges comme l'Antarctique, s'il l'est toujours, mais cela est une autre histoire...

Quel est votre projet artistique le plus fou ?
Valery Grancher :
J'essaye de ne jamais faire des projets fous mais extrêmes avec une grande rationalité et pragmatisme, il en va de ma survie... mais je penses surtout à mes projets dans l'espace comme l'acquisition légale de territoires sur la lune, ou la présence d'un de mes ready made sur Mars : http://www.nomemory.org/data2/mars

Ohhh et comment ont-ils soigné votre piqûre de mygale ?
Valery Grancher :
Avec des tisanes anti-venins et des argiles sur la piqûre... Je n'en sais pas plus...

Seriez-vous prêt à faire "n'importe quoi"pour l'amour de l'art ?
Valery Grancher :
Non, il faut toujours que ces projets, si ils impliquent d'autres personnes ou communautés leur apporte un bénéfice.

Vous considérez-vous comme quelqu'un d'original ?
Valery Grancher :
Non pas du tout, je ne fais que vivre dans le monde qui nous entoure.

Quel métier exerceriez-vous si vous n'étiez pas artiste ?
Valery Grancher :
Du fait de mon background universitaire, ingénieur télécom.

Recommanderiez-vous aux internaute une telle expérience ? Pourquoi ?
Valery Grancher :
Pas forcément, mais je recommande aux internautes de s'intéresser aux minorités et aux pays économiquement pauvre pour éviter une fracture numérique dans notre monde global.

Valery Grancher : Je vous remercie tous, vous pouvez en savoir plus sur ce projet à cette adresse : http://www.theshiwiarsproject.org. Mille mercis pour votre attention.

31 juillet 2006

"Escale estivale" France Inter 25 Juillet 2006 18h13:37



Le 25 Juillet dernier à 18h00 Marc Sanchez et moi étions interviewés sur l'exposition "Tropico vegetal lots in paradise", pour ma part cette itw portait sur le "shiwiars project" et le film "Tanguntsa Amazonie 0":
J'ai le plaisir ici d'en publier la scription de cet entretien :

25/07/2006

France inter
"Escale estivale"

Emmanuel KHERAD

HEURE 18:13:37

DUREE 00:15:08

Emmanuel KHERAD : Mais avant tout cela, nous recevrons Marc Sanchez, directeur des programmes du Palais de Tokyo, et l'artiste Valéry Grancher, à l'occasion de l'exposition "Tropico-Végétal" qui se tient jusqu'au 27 août, une vision artistique et écologique de la nature sauvage. Un DVD et un livre sont également parus et disponibles dans toute la France. Et on commence avec Donovan Frankenreiter, "Move by yourself". C'est "Escale estivale" jusqu'à 19h00. Bonne soirée !

Musique

Jingle

Emmanuel KHERAD : Marc Sanchez et Valéry Grancher sont les invités de cette première partie d'Escale. Alors vous êtes parmi nous à l'occasion de l'exposition "Tropico-Végétal" sous-titrée "Lost in Paradise", qui se tient au Palais de Tokyo à Paris jusqu'au 27 août. Valéry, vous, vous avez réalisé un DVD qui s'appelle "Tanguntsa Amazonie 0". Et ce DVD nous entraîne dans la jungle amazonienne dans un village considéré comme l'un des lieux les plus extrêmes de la planète.

Valéry GRANCHER : Oui, tout à fait.

Emmanuel KHERAD : Et vous avez rencontré là-bas le chef...

Valéry GRANCHER : Voilà.

Emmanuel KHERAD : ... le chef du village.

Valéry GRANCHER, Artiste : Alors pour préciser un petit peu l'endroit, c'est exactement la basse Amazonie de l'Equateur, la frontière Equateur-Pérou. Le chef de... la tribu visitée, ce sont les Jivaros, les réducteurs de têtes. Et c'est une tribu de 700 âmes qui se nomme les Shiwiars. Et j'ai rencontré là-bas le chef qui s'appelle Wonzalo et le chef de la confédération politique, puisqu'ils ont (eur petite confédération politique, qui s'appelle Pascual.

Emmanuel KHERAD : D'accord.

Valéry GRANCHER : Voilà.

Emmanuel KHERAD : Est-ce que vous vouliez nous faire découvrir le lieu, la population avec un regard d'ethnologue ?

Valéry GRANCHER : Ce n'est pas vraiment un regard d'ethnologue parce que c'est une démarche scientifique, l'ethnologie. Pour moi, c'était un regard d'un visiteur, c'est-à-dire le fait d'être complètement étranger à ce monde et de vivre avec eux, et de voir un peu ce qui s'y passe et comment ça se passe entre nous. Et finalement, il y a eu... plein de choses se sont manifestées par la suite puisque ça a donné un projet qui a couru sur une année au Palais de Tokyo.

Emmanuel KHERAD : Mais vous, vous êtes artiste, Valéry ?

Valéry GRANCHER : Oui.

Emmanuel KHERAD : Alors, est-ce que vous êtes artiste ou ethnologue ?

Valéry GRANCHER : Artiste.

Marc SANCHEZ : Vous vous sentez proche de quelle discipline ?

Valéry GRANCHER : Non, non, non ! C'est pour ça que je vous dis que c'est le regard d'un individu. L'art, ce n'est qu'une affaire de regard sur le monde et c'est de ça que cela parle essentiellement.

Emmanuel KHERAD : Oui.

Valéry GRANCHER : Et le film retrace justement toutes les phases de ce regard.

Emmanuel KHERAD : Une histoire de regard sur le monde. Marc Sanchez, c'est une définition qui devrait vous plaire parce qu'au Palais de Tokyo, vous avez, comme cela, cette dimension...

Marc SANCHEZ, Directeur des Programmes du Palais de Tokyo : On aime regarder le monde.

Emmanuel KHERAD : Voilà.

Marc SANCHEZ : On aime regarder le monde.

Emmanuel KHERAD : ... d'ouverture culturelle. Parfois, vous allez un peu trop loin mais bon, c'est votre façon de faire aussi, de provoquer les choses. Alors Marc Sanchez, l'idée de cette exposition, c'est effectivement d'attirer l'attention des Occidentaux sur la réalité des soi-disant... la réalité sociale des soi-disant paradis ?

Marc SANCHEZ : Alors cette exposition est en fait une série d'expositions. C'est un programme qui s'appelle "Tropico-Végétal" qui réunit cinq artistes et cinq territoires qui sont autonomes en fait, qui n'étaient pas forcément faits pour se rencontrer. Et dans le cadre de ce programme, on a mis en relation, on a mis en dialogue ces différents territoires en leur trouvant des points de correspondance. Le premier point de correspondance, c'est le fait qu'ils sont tous concernés par les tropiques au sens géographique du terme, mais aussi au sens mythique, mythologique, tout ce que cela représente le mot "tropique" déjà comme images. Le deuxième point de correspondance, c'est le lien avec un univers plastique de référence qui est l'univers végétal. Et donc on a pris comme ça plusieurs projets. On les a mis en espace. On les a mis en dialogue et ça a construit ce programme, à l'intérieur duquel intervient aussi Valéry Grancher dans une des soirées que l'on a appelées "Les nuits tropicales" - il y en a une dizaine en tout, tout au long de ce programme. Et tout ceci, eh bien, est censé montrer que, eh bien, que l'art va aussi sur des territoires parfois sur lesquels on ne l'attend pas a priori.

Emmanuel KHERAD : Alors quand on dit que "les tropiques, c'est un paradis, ce sont des paradis terrestres", est-ce que c'est un raccourci intellectuel pour vous ? Puisque, quand on voit votre exposition, ou le DVD, ou même le livre de Sergio Vega qui a été publié à l'occasion de cette exposition, qui est l'un des trois catalogues de l'expo, on s'aperçoit qu'il y a un message, un message politique, écologique.

Marc SANCHEZ : Absolument. Une des parties de l'exposition confronte deux projets d'artiste : celui de Sergio Vega et celui d'Allora et Calzadilla. Le projet de Sergio Vega traite du paradis. Et il est parti à la recherche du paradis à partir d'un livre du XVIIe siècle qui le situait au Brésil, dans la région de Mato Grosso. Et donc il travaille depuis cette période, depuis plusieurs années, sur cette région-là puisque pour lui, il est allé sur les lieux qui étaient définis comme étant le paradis ; puisque, jusqu'à il y a encore un siècle, on parlait du paradis au présent. On disait : "Le paradis est là. Le paradis se trouve là". Maintenant, on dit : "Le paradis se trouvait...", on en parle au passé. Mais il y a encore très peu de temps, on avait vraiment l'impression que quelque part sur terre, il y avait un lieu qui était censé être le paradis terrestre.

Emmanuel KHERAD : Mais on a toujours cette impression-là quand on pense à certaines îles.

Marc SANCHEZ : Oui, maintenant on regarde plutôt vers les nuages et puis, c'est un paradis...

Emmanuel KHERAD : Oui, c'est un autre paradis qui est là, hein, pour le coup !

Marc SANCHEZ : ... je dirais, qui se rapproche des images du Club Méditerranée ou des images...

Emmanuel KHERAD : Oui.

Marc SANCHEZ : ... un peu comme ça, de ce qui est censé être une situation idéale, "paradisiaque".

Emmanuel KHERAD : Alors, vous n'avez pas répondu à ma question Marc Sanchez.

Marc SANCHEZ : Oui, voilà ! Et ce projet-là...

Emmanuel KHERAD : Est-ce que c'est un raccourci intellectuel de dire que les tropiques, ce sont des paradis terrestres ?

Marc Sanchez : Bien sûr, c'est un raccourci intellectuel et c'est même faux. C'est une caricature. La preuve : la deuxième partie de ce que je voulais vous dire, c'était cette exposition d'Allora et Calzadilla qui parle d'une île paradisiaque, l'île de Vieques, qui est au large de Porto Rico et qui a été prise pendant quarante ans par les Américains comme un centre d'essai pour les tirs de bombardement et les bombardements alors que l'île est habitée hein, et par des cultivateurs de bananes, notamment. Et maintenant qu'ils ont réussi à mettre dehors les Américains, depuis quelques années, ils l'ont transformée en paradis. Et les touristes qui vont là-bas, qui voient cette île magnifique, eh bien, ne se rendent pas compte que ce paysage, ces paysages qu'ils admirent, eh bien, en fait sont dus à des bombardements incessants depuis plus de quarante années. Donc en fait, l'idée du paradis, elle peut parfois aussi reposer sur le chaos ou sur des situations qui sont beaucoup plus extrêmes que celles auxquelles on pourrait s'attendre.

Emmanuel KHERAD : Et puis, il y a le paradis que l'on imagine aussi dans certaines îles, dans certains pays, et des pays pauvres et c'est vrai que le livre de Sergio Vega montre cela, montre l'urbanisation aussi, c'est-à-dire le modernisme qui arrive et qui se confronte à la nature, donc à la jungle amazonienne aussi. Vous avez retrouvé cela, vous, quand on parle de catastrophes écologiques en Amazonie, vous, Valéry Grancher, quand vous êtes allé dans ce village ?

Valéry GRANCHER : Oui, très clairement.

Emmanuel KHERAD : Vous avez ressenti un changement, même si vous y alliez pour la première fois ?

Valéry GRANCHER : Eh bien, c'est... pour moi, ce qui a été le plus choquant, c'est tout simplement qu'il y a un réchauffement terrible qui fait que les niveaux des cours d'eau diminuent, la température augmente. Donc le poisson se fait plus rare et toute la chaîne alimentaire est perturbée. Et quand vous pensez que la communauté que j'ai visitée, c'est 6 adultes, 14 enfants vivant à plus de 1 heure 30 de la première présence humaine, 1 heure 30 en avion, vous avez un équilibre très précaire. Et ce déséquilibre se fait fortement ressentir parce que finalement, vous n'avez aucune présence occidentale, vous ne voyez pas de trait blanc dans le ciel ni de jet, il n'y a pas de bruit, vous êtes dans la nature. Et il y a une sorte de... il n'y a plus de distance entre vous et la nature. Et il y a quelque chose de terrible qui vous rappelle qu'on est là, et on trouve moins de gibier, on trouve moins de poissons, l'eau diminue. Ils ont des maladies qu'ils n'avaient pas auparavant, qu'ils attrapent. Les eaux peuvent être contaminées par des exploitants de pétrole ou des orpailleurs. Voilà ! Il y a toute une série de problèmes terribles.

Emmanuel KHERAD : Et le chef, vous l'avez fait venir à Paris...

Valéry GRANCHER : Oui.

Emmanuel KHERAD : ... dans le cadre de votre projet, notamment dans le cadre de cette exposition. On peut percevoir votre travail soit comme un travail d'ethnologue, comme on le disait, soit comme du voyeurisme aussi alors !

Valéry GRANCHER : Ce n'est pas...

Emmanuel KHERAD : Parce que pourquoi est-ce que vous avez voulu faire venir le chef amazonien ?

Valéry GRANCHER : Alors, c'était... parce que ce qui était important, pour moi, c'est qu'il y ait une bijection. Une bijection, c'est une relation dans les deux sens. Je me suis déplacé chez lui et il était important qu'il vienne chez nous aussi pour parler justement de sa vie, parce que je ne peux pas usurper sa parole. Il était important qu'il explique ces problèmes-là, qu'il explique ces contraintes. Et à la fois il était très heureux que ce contact ait pu s'établir, parce que finalement c'était une relation de deux personnes et il n'y avait pas de jugement de part et d'autre. On a simplement regardé de façon réciproque nos deux mondes et savoir comment on peut vivre ensemble. C'est ça la question du projet. Comment on peut vivre en respectant ces gens-là ?

Emmanuel KHERAD : Oui, parce que j'allais dire, eux, ils n'ont peut-être pas envie de vivre avec nous.

Valéry GRANCHER : Non.

Emmanuel KHERAD : Ils sont très bien dans leur village et...

Valéry GRANCHER : Non. Tout à fait. Et maintenant ils établissent un contact actif parce qu'ils n'ont pas le choix.

Emmanuel KHERAD : D'accord.

Valéry GRANCHER : Parce qu'ils ont compris que finalement, s'ils veulent continuer à exister, il faut qu'on sache qu'ils existent. Et que pour qu'on sache qu'ils existent, ils doivent aller vers nous, ils doivent établir un contact. Et c'est un peu en contradiction de, justement, leur mode de vie qui consiste à vivre entre eux tranquillement dans leur paradis, parce que pour eux, ils ont une relation paradisiaque avec leur nature justement.

Emmanuel KHERAD : Et l'art a un rôle à jouer alors d'après vous ? C'est-à-dire qu'on peut mener des travaux artistiques pour dénoncer ou attirer l'attention...

Valéry GRANCHER : Complètement.

Emmanuel KHERAD : ... dire : "Voilà ! En occident, on a cette perception, et moi avec mes outils, avec la photographie, avec...

Valéry GRANCHER : La vidéo.

Emmanuel KHERAD : ... pourquoi pas les arts plastiques mais aussi évidemment, la vidéo, on arrive à susciter des choses" ?

Valéry GRANCHER : Je pense que dans différentes sociétés, l'art, c'est une médiation. C'est une médiation entre le monde, entre la nature... Au XIXe siècle, c'était question de regarder la lumière, le paysage, les impressionnistes, et aujourd'hui on est plus sur le regard des médias. Et c'est de ça qu'il s'agit, c'est de la médiation.

Emmanuel KHERAD : Alors Marc Sanchez, c'est vrai que dans l'exposition par exemple, vous présentez des piranhas, des orchidées, enfin toutes sortes d'espèces végétales et animales. C'est de l'art vivant pour vous ? C'est cela ?

Marc SANCHEZ : En tout cas, c'est de la vie qui fait partie de l'art. Un des projets dont vous parlez qui est cette forêt d'orchidées suspendue de Henrik Hakansson, ou cette forêt qui est couchée, ou bien ces animaux qui sont filmés avec des caméras de surveillance. Eh bien, pour lui, c'est une manière de prendre référence à partir d'un univers extrêmement codifié, l'univers végétal ou bien les animaux, et puis d'en faire autre chose qu'il déplace sur le territoire de l'art et de nous montrer donc les choses autrement.

Emmanuel KHERAD : C'est-à-dire que vous jonglez en fait entre l'erreur... l'horreur écologique - l'erreur, vous voyez le lapsus ? - qui se déroule en ce moment dans la forêt amazonienne par exemple, et le rêve des îles. C'est-à-dire votre provocation intellectuelle à vous, elle est là ?

Marc SANCHEZ : Tout à fait. C'est la place de l'art. La place de l'art, c'est de secouer un petit peu l'équilibre des choses pour rendre visible certaines choses qui ne le seraient pas de prime abord, ou bien pour faire réfléchir tout simplement les gens à partir d'une situation donnée.

Emmanuel KHERAD : En leur donnant de la matière pour s'extasier aussi puisque...

Marc SANCHEZ : Tout à fait.

Emmanuel KHERAD : ... c'est vrai que vous dénoncez un peu le regard de l'occidental, et puis en même temps, vous lui donnez de quoi s'extasier dans votre exposition.

Marc SANCHEZ : Bien sûr ! Parce qu'il ne s'agit pas non plus de nier le droit au plaisir que l'on a quand on visite une exposition, hein ! L'exposition de Sergio Vega est très agréable, l'exposition de Henrik Hakansson aussi. Ce sont des lieux aussi où on joue sur tous les terrains : sur le terrain aussi de la séduction, sur le terrain de la beauté au sens le plus large et traditionnel du terme, mais aussi sur celui du simple fait de maintenir l'esprit en éveil et l'esprit critique surtout.

Emmanuel KHERAD : Merci beaucoup Marc Sanchez et Valéry Grancher. Je rappelle que l'exposition "Tropico-Végétal, Lost in Paradise" se tient au Palais de Tokyo jusqu'au 27 août. Le DVD de Valéry Grancher se nomme "Tanguntsa Amazonie 0", il est disponible dans les librairies spécialisées, mais aussi sur Internet. Merci à vous deux. On laisse les références en tout cas sur notre site à nous Internet franceinter.com, rubrique "Escale estivale". Merci.

Marc SANCHEZ : Merci.

Valéry GRANCHER : Merci.

Emmanuel KHERAD : Et on quitte la nature et les paradis terrestres pour retrouver le Kamasutra de Michel Polnareff. Encore que le Kamasutra, ça peut nous rapprocher du paradis. Bonne soirée à vous sur France inter.

Valéry GRANCHER : Il n'y a rien de plus naturel !

FIN

19 juillet 2006

Recettes shiwiars



Voilà lors de la cinquième nuit tropicale de l'exposition "Tropico vegetal lost in paradise" du Palais de Tokyo, après la projection du film "Tanguntsa amazonie 0" (voir le lien sur la droite dans la rubrique vidéos), une soupe et une boisson shiwiars avaient été offertes par la communauté de Tanguntsa aux visiteurs:
Ces mets très exotiques faits à partir d'ingrédients typiquement amazoniens, peuvent être cuisinés désormais chez vous. Dans notre monde global, désormais, n'importe quelle racine, légume ou végétal amazonien peut être trouvé dans des boutiques exotiques telles que les supermarchés des Tang frères (épiceries chinoises, antillaises)!
Comme quoi l'amazonie se trouve à notre porte, et si vous le voulez bien en suivant les recettes ci-dessous, vous ferez un voyage gastronomique inoubliable !!!
Ces saveurs ne peuvent être partagées, normalemant, qu'à Tanguntsa, e,t cela est la première fois, qu'elles peuvent désormais être partagées par tous.
A la demande de cette communauté de 20 âmes, je vous transmet ces recettes:

SOUPE "SANGAKU":

Ingrédients:

1.5 Kg de Manioc
2 Kg de bananes Plantin bien vertes
2 paquets de Nogaïl ( eddo)
1 demi piment des Antilles
2 Kg de patates douces
1.5 Kg de petit Taro
5 pièces de Truite entière juste nettoyée ( environ 450g.)

Recette:

Couper le tout en gros morceaux, mettre l'ensemble dans une grosse marmite mouillée à hauteur
Faire bouillir le tout à feu moyen pendant environ 20 mns.

"CHICHA DE BANANE"S:

Laisser bouillir dans de l'eau des bananes très mûres.
Une fois cuites, les fouetter, laisser refroidir et servir à température.

30 juin 2006

Le film



La cinquième nuit tropicale fut un vrai succès avec un public très important et très sensible. Pour ceux qui n'ont pu se rendre à cet évènement, vous trouverez ci-contre la vidéo en ligne du film "Tanguntsa amazonie 0": (Soyez patient il s'agit d'un fichier de 96 Mo ! 5 à 10 minutes d'attente parfois...)
Vous trouverez le lien vers cette vidéo sur la droite de votre écran dans la rubrique "Documents vidéos et audio" ...

25 juin 2006

"Tanguntsa amazonie 0"


"Shiwiars" edited by onestarpress.com


Le 29 Juin prochain à 20h30 aura lieu la cinquième nuit tropicale de l'exposition "tropico vegetal" lost in paradise du Palais de Tokyo, dédiée au shiwiars project avec la projection de mon dernier film produit pour cette occasion "Tanguntsa Amazonie 0" réalisé sur la base de l'objet radiophonique produit et diffusé par France Culture le 22 Janvier dernier.

A cette occasion seront lancées deux éditions vidéos:

- Le DVD édité par Onestarpress (cliquer sur mon nom dans liste des artistes sur le site de l'éditeur) du film "Shiwiars".
- Le DVD du film "Tanguntsa Amazonie 0" édition d'art diffusée par incognito.vu .
Ce coffret 'collector' comprend:
-> 1 DVD PAL avec le film de 53 minutes avec signature manuscrite
-> 1 CD Bonus avec la vidéo quicktime (320*240) de la table ronde "The shiwiars project" qui a eu lieu le 4 Novembre 2005 au Palais de Tokyo avec Anne Christine Taylor du musée du Quai de Branly, Jean Patrick Razon de survival international, Pascual Kunchicuy Carrasco chef politique de la confédération shiwiar, Marc Sanchez directeur des programmes du Palais de Tokyo; et; une image haute définition à imprimer soi même au format de son choix sur le dos de laquelle pourra être apposée une étiquette adhésive avec ma signature manuscrite.

Pour ceux qui ne peuvent se déplacer sur Paris et seraient désireux de commander ce DVD, il est au prix de 75 euros et la commande peut être transmise aux adresses emails suivantes:
vgrancher@nomemory.org
artclub@incognito.vu

20 juin 2006

Nuit Tropicale N° 5 exposition "Tropico végétal" Lost in Paradise, Palais de Tokyo

J'ai le plaisir de vous inviter à la cinquième nuit tropicale de l'exposition "Tropico végétal lost in paradise" au Palais de Tokyo, qui sera dédiée à mon projet "The shiwiars project" le 29 Juin prochain à 20h30:
C'est l'histoire de cette aventure qui est contée tout au long d'un film nommé "Tanguntsa Amazonie 0" par une véritable immersion dans l'univers sensoriel de ces territoires. Images tournées sur place, sons prélevés dans la nature, discussions avec les indigènes, chants des femmes shiwiars, récits et impressions du voyage, cette matière sonore et dense et riche d'émotions m'a permis de construire une pièce radiophonique qui a été produite et diffusée par France Culture (Atelier de la création radiophonique) le 22 Janvier dernier.
Afin de produire ce film, j'ai enrichi cette pièce radiophonique d'images prises et tournées sur place, donnant ainsi une nouvelle dimension à ce travail, une dimension cinématique...

17 juin 2006

Troisième nuit tropicale: "Parc Central"

Première présentation du DVD "Parc Central" de Dominique Gonzalez Foerster, édité par MK2, et interventions live de Adanowsky, Xavier Boussiron et Christophe Van Huffel, compositeur de la bande son du DVD...

Vendredi 23 Juin à 21h00 au Palais de Tokyo

06 juin 2006

8 Juin 2006

N'oubliez pas l'ouverture de cette excellente exposition au Palais de Tokyo !
"Tropico-Vegetal" lost in paradise

Cinq expositions personnelles:

- Jennifer Allora et Guillermo Calzadilla "Land mark"
- Henrik Hakansson "A travers bois pour trouver la forêt"
- Salla Tykkä "Zoo"
- Sergio Vega "Crocodilian fantasies"
- Steiner et Lenzlinger "Grottes sauvages sur forêt cérébrale civilisée"

Dix nuits tropicales:

- 9 Juin 20h30: "A la echerche du Paradis" Sergio Vega et Jean Delumeau
- 10 Juin 20h30: "Territoires en mutations" Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla, Patricia Falguières et Natasa
- 23 Juin 20h: "Parc Central" Dominique Gonzalez Foerster, avec live de Adanowsky, Xavier Boussiron et Christophe Van Huffel
- 24 Juin 20h: "Paysages et découvertes" Gilles Clément et Patrick Blanc, Louidji Beltrame, Alexandre et Daniel Costanzo et Jimmy T, Romain Kronemberg
- 29 Juin 20h30: "Tanguntsa amazonie 0" par moi même ;-) avec "spirituellement" Pascual Kunchicuy Carrasco (selon sa volonté !)
- 6 Juillet 20h30: "Carribean Nites" Caecilia Tripp et Françsoise Vergès, the Trinity, Melvin Moti
- 8 Juillet 20h30: "Hormigas Culonas/Amigas Culonas" Françoise Vincent + Elohim Feria
- 12 Juillet 20h30: "Accousma jungle" Jonathan Pragger, Michel Redolfi, Bernard Parmegiani, Beatriz Ferreyra, Denis Dufour, François Bayle
- 19 Juillet 20h30: "Pablo Internacional" Pablo Leòn de la Barra, Tetine, Assume vivid astro focus
- 24 Août 20h30: "The Land Fundation" Angela Detanico et Rafael Lain

La Cabane vidéo:
Mathilde Rosier, Françaois Xavier Courrèges, Fabiano Marques, Louidji Beltrame, Christian Merlhiot, Melvin Moti, Angela Detanico et Rafael Lain, Caecilia Tripp, Wagner Morales.

Le programme détaillé en fichier PDF sur ce lien